De 1926 à 1932 à Los Angeles, les parcours chaotiques d’une gloire du cinéma muet, d’une starlette, d’un homme à tout faire mexicain et d’un musicien noir dans le Hollywood des années folles, patrie du rêve et de toutes les dépravations.

L’interminable première séquence est à l’image de ce que sera tout le film. Un pachydermique foutoir orgiaque où Damien Chazelle multiplie les mouvements de caméra, aussi spectaculaires que complètement vains, à la poursuite de personnages schématiques brossés à gros traits. Hormis la star du muet interprétée avec une certaine dérision par Brad Pitt, aucun des destins des trois autres personnages n’est vraiment développé et arrive à émouvoir.
À courir après plusieurs lièvres à la fois le cinéaste finit par se perdre, au point qu’il devient difficile de saisir ce qu’il cherche à nous raconter. Une histoire d’amour contrariée ? La grandeur et la décadence de deux parvenus dans une industrie cinématographique en pleine mutation ? Le passage du cinéma muet au parlant et ses conséquences pour les artistes et la manière de faire des films ? Les fêtes et les débauches monumentales du Hollywood des années folles ? Sans doute un peu tout cela mais sans que rien ne soit vraiment approfondi. Chazelle passe même sous silence l’année 1929 et son fameux crack boursier qui a pourtant grandement participé à la ruine de nombre de stars de l’époque du muet.
Grande fresque, aussi baroque que boursouflée, mise en scène par un réalisateur doué qui semble perdre ses moyens à trop en avoir à sa disposition, Babylon se transforme rapidement en une œuvre sans âme où l’esbroufe et la provocation gratuite (on a droit au caca, pipi, vomi) tiennent lieu de fil conducteur et où le recyclage sert de moteur principal.
Quand il ne s’auto-cite pas musicalement (l’une des musiques récurrentes du film est une reprise à peine transformée d’une des partitions de La La Land), Damien Chazelle passe son temps à faire référence à ses glorieux ainés. En particulier à Chantons sous la pluie qu’il va jusqu’à plagier sans grâce (notamment lors de la très longue séquence de tournage en mode sonore avec Nellie LaRoy) et sans parvenir à ce que les deux films se répondent entre eux. Pire, dans un final abrutissant – qui mériterait l’Oscar de la fin la plus interminable de l’histoire du cinéma – il cite clairement ses sources, donnant à voir le fossé qui le sépare du film de Stanley Donen et se tirant, par la même occasion, une balle dans le pied. N’est pas Kubrick, ni Tarantino qui veut.
Devant un tel gâchis, c’est le titre d’une vieille chanson de Bill Deraime qui vient à l’esprit : Babylone tu déconnes.