En Sicile, dans les années 60, une jolie jeune femme entre au service d’un veuf et de ses trois garçons. Rapidement, la gentillesse, l’efficacité et la beauté d’Angela finissent par séduire le marchand de vêtements esseulé ainsi que ses deux grands enfants.
Si les avances de l’aîné, tout juste majeur, sont vite repoussées par la jeune employée de maison, les relations avec Nino, son cadet, s’avèrent beaucoup plus troubles.

Petite perle de la comédie érotique italienne, sous-genre qui connut son heure de gloire dans les années 70, Malicia fut un énorme succès dans son pays grâce à la beauté de Laura Antonelli. Il faut dire qu’après quelques apparitions dans des films français (notamment Les mariés de l’an deux), l’actrice s’était faite remarquer dans son pays en dévoilant ses charmes dans Ma femme est un violon. Deux ans plus tard, elle récidive dans ce film qui, sous couvert d’une comédie gentiment grivoise, aborde avec une surprenante perversité le passage de l’adolescence à l’âge adulte.
Débutant son film par une veillée et un enterrement qui n’ont rien de funèbre, notamment grâce aux remarques et à l’attitude décalée du petit Enzino, Salvatore Samperi annonce d’emblée sa volonté de réaliser une comédie aussi noire qu’impertinente.
Plus que les quelques femmes en dessous sexy, c’est la liberté de ton de Malicia qui surprend. Nino et son copain Stefano sont tous deux obsédés par la bagatelle et rêvent, tout en fumant comme des grands, de se déniaiser avec des femmes matures. Des femmes qui ne sont pas insensibles au charme de l’entreprenant Nino et font rapidement flirter le film avec le détournement de mineurs, thème un temps désamorcé par le ton badin et décalé du propos. Un temps seulement car, contre toute attente, le cinéaste fait vite prendre à son récit une tonalité plus sombre, dénonçant le patriarcat et la place de la femme dans la société italienne de l’époque. Devant sa caméra, le gentil Nino se transforme en un petit psychopathe qui prend plaisir à tourmenter Angela. S’instaure, entre eux, un rapport sadomasochiste dont on se demande en permanence si la jeune femme est la complice ou la victime. Un doute que Samperi prend un malin plaisir à laisser planer jusqu’à l’étonnant et orageux retournement de situation final qu’il filme à la manière d’un giallo.

C’est peu dire que le cinéaste doit beaucoup à son couple de comédiens. Belle et sensible, Laura Antonelli est parfaite dans le rôle d’Angela qu’elle incarne avec une étonnante ambivalence, entre ingénuité et perversion. Mais c’est surtout l’interprétation ambiguë et très mure d’Alessandro Momo qui étonne et fascine. Un jeune acteur promis à une grande carrière (son dernier film sera Parfum de femme de Dino Risi) qui décédera, hélas, dans des circonstances tragiques, un an après le tournage.
Imité mais rarement égalé, Malicia reste assurément l’une des perles de la comédie érotique italienne. Notamment grâce à la façon dont Salvatore Samperi pervertit habilement les codes établis pour mieux imposer son propos sulfureux. Marquant durablement l’esprit, ce film est une malicieuse réussite.