Pour échapper à leur vie morne et retrouver la fibre enseignante, quatre copains se lancent dans une étude scientifique et mettent en pratique la théorie d’un psychologue norvégien selon laquelle l’homme aurait dès la naissance un déficit d’alcool dans le sang. Pour vivre heureux, vivons bourrés ?

Plaçant son film sous l’égide alcoolisée de quelques grands hommes, Thomas Vinterberg reprend à son compte l’adage de Churchill : « J’ai retiré plus de choses de l’alcool que l’alcool ne m’en a retirées. » et met en scène sa Grande biture, comme autrefois Marco Ferreri nous conviait à sa Grande bouffe. Mais là où le cinéaste italien fustigeait la société de consommation, le danois envisage plutôt l’ivresse comme une échappatoire à la rigueur protestante des pays nordiques et se rapproche, dans l’idée, du film de Gabriel Axel : Le festin de Babette. Préférant l’excès à la morne sobriété, Vinterberg nous distille un film enivrant qui monte progressivement en charge pour mieux se moquer de la bienséance et du politiquement correct. Un cocktail savoureux d’humour et d’allégresse que relève une touche d’émotion venant, à point nommé, nous rappeler que tout n’est pas si rose dans la cirrhose.
Alors même si la vision des femmes dégrise un peu, elle n’entame pas l’indéniable réussite de Drunk qui doit aussi beaucoup à son épatant quatuor d’acteurs où brille la performance de Mads Mikkelsen, professeur devenu abstinent à lui-même et à qui l’alcool permet de rendre la vie potable. L’énergie de son jeu étroitement mêlé à celle de la mise en scène de Vinterberg trouve son accomplissement dans un étourdissant final. Que ce dernier envol précède une chute ou une rédemption, selon que vous envisagiez la vie comme un verre à moitié vide ou à moitié plein, ne passez pas à côté de ce désaltérant nectar.