Affiche du film Le traître
Dans les années 80, suite à une guerre sans pitié entre deux parrains siciliens, un membre de Cosa Nostra décide de rompre la loi du silence et de révéler au grand jour, en collaboration avec le juge Falcone, les crimes ainsi que les hommes liés à la mafia.
A la vision américaine, façon Le Parrain, qui dénonce autant qu’elle mythifie les hommes et les actions de la mafia, Marco Bellocchio répond par une œuvre tout aussi forte et ambitieuse qui, si l’on excepte quelques jolies scènes oniriques, s’ancre dans une réalité où les protagonistes et leurs agissements n’ont plus rien de glamour, ni de glorieux. Plutôt que de se focaliser sur leurs exactions qu’il met en scène sans esbroufe dans leur banalité crue, le cinéaste préfère démonter les rouages de l’intérieur en s’attardant sur les confrontations, par le regard et la parole, de ses différents personnages lors des hallucinantes séquences de procès qui émaillent le film. Une parole théâtrale, proche de la commedia dell’arte, s’y dévoile où la ruse prédomine tandis que les regards fuyants ou en coin tentent de dissimuler les arrière-pensées de chacun.
Dans le rôle du mafioso repenti, qui pour venger l’assassinat des siens permit l’arrestation de 350 de ses adversaires, Pierfrancesco Favino est épatant en homme mutique que l’on ne parvient plus à faire taire. Il contribue à la réussite de ce film parfaitement maîtrisé, l’un des meilleurs sorti en 2019, qui confirme que Mario Bellocchio a sa place parmi les grands cinéastes italiens.