Les parcours de Benjamin et Abdel, internes dans le même service d’un hôpital de la région parisienne. L’un jeune diplômé, l’autre plus expérimenté mais étranger.
Leur vie de médecin au quotidien entre joies, peines, espoirs, doutes et désillusions…
C’est à un beau récit initiatique dans l’univers méconnu des internes en médecine que Thomas Lilti nous convie. Loin des séries médicales dont la télé nous abreuve et auxquelles le cinéaste fait quelques clins d’œil amusés au début de son film (médecins, infirmiers et patients regardent tous Dr House), Hippocrate aborde avec intelligence le passage à l’âge adulte d’un jeune homme dont le métier – « la malédiction » dit l’un des personnages – est de soigner et de sauver des vies.
Entre drôlerie et amertume, entre chronique intime et documentaire le film ne choisit pas et trouve son équilibre en naviguant avec aisance de l’un à l’autre.
La mise en scène sans esbroufe de Thomas Lilti aborde avec la même justesse les différentes problématiques du film : qu’elles concernent les affres et les questionnements de ses deux internes vis-à-vis de leurs patients ou les mutations du service hospitalier qui finit par privilégier la rentabilité à la qualité des soins.
Hippocrate doit aussi beaucoup à ses interprètes et plus particulièrement à ses deux comédiens principaux.
Véritable révélation, Reda Kateb insuffle ce qu’il faut d’empathie et de sincérité à son personnage de médecin étranger (qui doit de nouveau faire ses preuves pour exercer en France) grâce à la sobriété de sa composition. Il offre un parfait contrepoint au jeu très expressif de Vincent Lacoste – le plus célèbre adolescent du cinéma français depuis sa découverte dans Les beaux gosses – qui se métamorphose littéralement sous nos yeux et passe progressivement, comme Benjamin, à l’âge adulte. Gamin et mature à la fois, il apporte une surprenante ambivalence à son rôle, entre compromission et contestation, tout en parvenant à rester sympathique. Ce qui n’est pas un mince exploit !
Ce film, humain et engagé, réconcilie avec les hommes et les femmes qui ont prêté le serment d’Hippocrate et fait oublier les fâcheux qui, par appât du gain, semblent parfois avoir prêté le serment d’Hypocrite.
C’est en effet un film à voir, pour comprendre ce que vivent ces internes qui sont entrés en médecine comme on entre en religion, avec en plus une détermination et une endurance de sportifs de haut niveau. L’internat est difficile, stressant et demande un courage qu’ils ont tous, mais qui les endurcit.
Interne en médecine, c’est difficile et humain, et les quelques 1500 € qu’ils gagnent laborieusement au bout de 7 ans d’études (quasiment rien avant, l’internat commence à la 7 eme année) sont très largement mérités, au regard du nombre d’heures, de gardes et de fatigue. Au bout de 11 ans d’études, certains médecins gagnent très bien leur vie, et alors, ils l’ont largement mérité, ils n’ont pas volé leurs revenus. Mais au final, ils ne sont pas si nombreux à faire déborder le tiroir-caisse, pas les hospitaliers, ni les généralistes, en tout cas.
J’ai vu la présentation du film, c’est tout à fait ça, interne en médecine. Chapeau bas, parce que c’est pas facile…
J’ai également écrit sur ce film, que j’ai trouvé vraiment très bien.
Merci pour ce bel article.
Je n’irai pas jusqu’à dire que ce film m’a réconcilié avec les toubibs, mais on ne peut qu’être sensible à cette description du monde des internes, effectivement inconnu des patients de passage qui arrivent avec leur petits ou gros bobos et qui n’entrevoient pas la réalité de ces héros modernes.
On comprend bien aussi le besoin de ces jeunes de se défouler de temps à autre et la distance qu’ils doivent s’imposer pour ne pas porter tout le malheur du monde sur leur jeunes épaules.
Et en plus, ce n’est ni larmoyant, ni exagérément distant face à la souffrance, un subtile équilibre a été trouvé par les réalisateurs qui nous prouvent encore ici leur talent à raconter une histoire qui coule bien et qui nous apprend à la fois.
Je ne peux pas faire ici la liste des mérites que je trouve à ce film, presque parfait sous tous rapports. Je ne peux qu’inviter, à la suite de Marcorèle, à aller le découvrir par lui-même et ajouter ici son commentaire.
Tout cela est bien dit. Par contre, où as-tu vu plusieurs réalisateurs ?
L’émotion, sans doute ! 🙂