
Du débarquement en Afrique du Nord en 1942 à la libération des camps en Tchécoslovaquie, l’épopée guerrière d’une escouade de jeunes fantassins et de leur sergent pendant la seconde guerre mondiale.
Après dix années passées loin des plateaux de cinéma, Au-delà de la gloire signe le grand retour de Samuel Fuller sur le devant de la scène avec un projet qui lui tenait à cœur. Mettre en scène ses souvenirs de combattant et de reporter pendant la seconde guerre mondiale au sein de la Big Red One (qui donne son titre original au film), la première division d’infanterie américaine.
En mêlant scènes de batailles et moments plus intimes, Fuller propose une immersion presque documentaire dans la vie du troufion en temps de guerre. Décrivant, avec lucidité et cynisme, les vies de ces jeunes engagés qui tentent de survivre jusqu’au prochain assaut. Une vision intime, parfois proche de l’absurde, rarement montrée dans les films de guerre qui préfèrent le plus souvent privilégier l’aspect spectaculaire des combats plutôt que leurs côtés sordides ou incongrus.
Dommage que le manque de moyens (notamment lors de la séquence du débarquement à Omaha Beach) et les coupes qui ramenèrent ce film fleuve de 4 heures à un montage de moins de 2 heures pour sa sortie en salles en 1980 (puis à une nouvelle version de 2h30 en 2005) affaiblissent le propos et donnent souvent la sensation d’assister à une succession d’affrontements sans véritables liens entre eux. Il en va de même des rencontres aussi récurrentes qu’improbables avec un dangereux soldat allemand, sorte de Némésis du personnage incarné par Lee Marvin, qui ont du mal à trouver leurs justifications sans doute à cause de ces versions écourtées.
Des imperfections heureusement compensées par la mise en scène inventive de Fuller qui, d’un côté, donne du souffle aux scènes de combats même les plus bricolées et, de l’autre, traite avec pudeur la libération du camp de concentration de Falkenau. Un évènement traumatique évoqué au travers de deux séquences d’une mémorable justesse : celles du four crématoire et de l’enfant déporté.
Si l’interprétation du film est parfaite (de Robert Carradine – en double du cinéaste, cigare vissé à la bouche – à Mark Hamill – dans son seul film notable hors Guerre des étoiles – en passant par Samuel Fuller qui se met brièvement en scène dans le rôle peu gratifiant d’un réalisateur de films de propagande des armées) c’est surtout la prestation de Lee Marvin qui impressionne. À plus de 50 ans, il porte Au-delà de la gloire sur ses épaules et donne au sergent Possum toute l’épaisseur et l’ambiguïté requises.

Film de guerre à hauteur d’hommes, ce récit très personnel, aux allures de testament cinématographique, permet au réalisateur de Shock Corridor de témoigner une dernière fois de l’horreur de la guerre et de l’impensable génocide que l’homme, dans sa folie, a rendu possible.
Dans les classiques du film de guerre, il y a ‘Le Jour le plus long’ (que j’apprécie pour son casting et son sens du spectacle), film de producteur (et de propagande) tout à la gloire de l’armée américaine qui a libéré toute seule (!!?) la France, l’Europe… et même gagné la 2e Guerre Mondiale.
Et puis il y a les électrons libres, des poils à gratter tel Sam Peckinpah et sa ‘Croix de Fer’ (la guerre sur le front russe vue par des soldats allemands) ou Samuel Fuller qui a, contrairement à John Wayne, connu l’horreur des combats et la libération des camps de concentration.
On ne peut que rêver une version longue de cet ‘Au-Delà de la Gloire’. En l’état quel film et quel casting !
Je crois que les bobines de la version longue d’Au-delà de la gloire sont définitivement perdues. Dommage. 😉
Bravo pour cet article, il est toujours bon de rappeler qu’il existe d’autres films sur le débarquement que « le jour le plus long » ou « Saving Private Ryan ». C’est un peu le « Band of Brothers » de Fuller qui a dépeint maintes fois auparavant l’horreur des combats. En plus d’être un très grand réalisateur (dont tu rappelles à juste titre le génie de la mise en scène en dépit de moyens bien plus modestes que les précédents films cités), Fuller dirige à merveille Lee Marvin, autre vétéran et, sauf erreur de ma part, le seul acteur oscarisé (mais pas pour ce film) ayant également reçu la Purple Heart (honneur également attribué à Oliver Stone). Un film qui porte ainsi le poids de deux vécus.
Merci pour ces précisions. 😀
Merci pour la découverte, je ne connaissais pas ce film 😉