Par une nuit pluvieuse de 1969, plusieurs personnes se croisent dans l’ancien hôtel de luxe El Royale. Hasard du voyage ou desseins secrets ? Au fil d’une soirée de plus en plus sanglante, hôtel et clients vont dévoiler leurs secrets…
Après un premier film malin – La cabane dans les bois – qui revisitait avec bonheur les clichés propres à certains films d’horreur forestiers, Drew Goddard choisit de passer de la baraque en bois au palace et de s’amuser avec les codes du polar noir saignant (celui des « pulps » chers à Tarantino) dans un séduisant récit découpé en chapitres où il montre une nouvelle fois sa fascination pour l’espionnage et les faux semblants, tout en prenant son temps pour avancer les pions de son intrigue.
Et quels pions ! Jeff Bridges, Chris Hemsworth, Jon Hamm ou Dakota Johnson pour les plus connus, mais aussi des débutants prometteurs comme Lewis Pullman et Cynthia Erivo. Une distribution épatante qui parvient à nous tenir en haleine pendant plus de deux heures en dépit d’un regrettable manque d’humour et de certains aspects du scénario fâcheusement dissimulés sous le tapis comme s’ils n’étaient que de simples artifices destinés à stimuler les nombreux coups de théâtre (Quelle est l’identité du premier tueur ? Qui sont les mystérieux propriétaires de l’hôtel ? Quelle est la mission de l’agent du gouvernement ?).
Pas de quoi, cependant, bouder son plaisir devant ces rebondissements échevelés astucieusement inscrits dans leur époque (la fin des années 60, Nixon, la guerre du Vietnam, les sectes…) et aussi bien mis en scène que mis en musique.
Oui, agréable découverte pour moi aussi (dommage que le film ne fasse pas plus parler de lui). Je trouve qu’on pourrait mettre sur l’affiche la mention : « le nouveau Tarantino est arrivé ! ». Et c’est un compliment pour moi, car s’il ressemble pas mal aux ‘8 Salopards’ (un huis clos en pleine campagne où va se rejouer une partie de l’Histoire des USA), il a le mérite de ne pas durer trois longues heures interminables.
A propos des pistes laissées sans réponse, je crois que Drew Goddard (aucun lien avec Jean-Luc 🙂 ) sème suffisamment d’indices pour que le spectateur puisse déduire pas mal de choses. La mise en scène et le scénario insistent bien sur le fait que les apparences sont trompeuses. Ainsi, chaque personnage n’est pas celui qu’il prétend être, les miroirs servent autant à se regarder qu’à être observé, il y a des micros partout, on trouve même une bobine de film compromettant un personnage important… Bref, le film et le scenario concentrent toute la paranoïa des années de Guerre Froide et on devine que cet hôtel doit être sous la coupe de la mafia ou de J. Edgar Hoover, voire des deux. Qui est sur la bobine ? Ca n’a pas grande importance dans l’intrigue principale, mais je parierai qu’on y trouve quelqu’un de la stature d’un JFK en compagnie d’une certaine Marilyn M. Bref, le film fait référence au passé (les années ’70) pour parler de notre présent tout aussi chaotique.
Mais je ne peux pas en dire plus car je sens qu’on nous surveille…
😉
Bien dit. Et merci pour ce long et instructif commentaire…
Chuuut ! 😉
Merci pour cet article, je ne savais pas quoi penser de ce film.
Je me le note :)!
De rien, Isa. 😉
Bonne surprise en effet, même si le rapprochement avec Tarantino n’est que superficiel (les frères Coen ne sont pas loin non plus). Nico à raison de noter l’importance des miroirs, limprtance du point de vue, des identités secrètes et des éléments de scénarios laissés en suspens (volontairement, Goddard affirme en interview vouloir laisser le spectateur combler les vides selon son bon vouloir). Un peu long tout de même, et sans doute un peu paresseux parfois dans l’écriture, cela n’enlève rien au talent de ce vieux compagnon de route de Whedon, pur produit de la télévision qui fait aussi des étincelles au cinéma.