Séduite puis délaissée par son amant, le marquis des Arcis, qui lui avait promis un indéfectible amour, Madame de La Pommeraye entreprend de se faire justice avec l’aide de Mademoiselle de Joncquières et de sa mère, deux femmes infortunées qu’elle a prise sous son aile.
Qu’Emmanuel Mouret aborde le siècle des lumières et du libertinage semble une évidence tant il n’a cessé, au travers de ses films, de disséquer les jeux de l’amour et du langage. Cinéaste des séductions, il poursuit son exploration du sentiment amoureux par le biais du film en costumes à la manière d’un Michel Deville lorsque ce dernier réalisait son Benjamin ou les mémoires d’un puceau. La comparaison s’arrête là, car si Mouret – tout comme Deville – n’a pas son pareil pour mettre en valeur ses actrices (Cécile de France, Alice Isaaz, Natalia Dontcheva et Laure Calamy sont toutes excellentes), son évocation du 18ème siècle manque ici de verve et se complait dans une forme de verbiage qu’accentue le parti pris des plan-séquences. Un choix qui aurait pu s’avérer payant si Emmanuel Mouret était parvenu à rythmer son film autrement que par de longues tirades que les comédiens récitent en cherchant à s’occuper les mains, faute d’avoir matière à jouer. Cécile de France passe beaucoup de temps à déambuler une tasse à la main, à chercher comment bien disposer un vase ou un petit tableau, comme si le verbe n’arrivait pas à s’accommoder de l’action.
Autre point faible du film, et pas des moindres, la présence d’Edouard Baer dans le rôle du marquis. Véritable anachronisme ambulant, avec son air de ravi de la crèche et son phrasé désinvolte, il manque singulièrement de charisme, voire de cynisme, pour que l’on puisse croire un instant à son personnage de grand séducteur.
Heureusement, grâce à l’élégance de la mise en scène et au soin apporté au choix des musiques ainsi qu’à la mise en valeur des décors naturels – comme autant de tableaux champêtres – le film ne manque pas de charme. Surtout dans sa seconde partie qui voit l’élaboration de la vengeance concoctée par Madame de La Pommeraye et l’arrivée de la fameuse Mademoiselle de Joncquières. Et pourtant, quel triste constat que celui de ce film qui laisse entendre que, quoi qu’elles fassent, les femmes finissent toujours par se faire avoir…
Avec son style bien à lui, Emmanuel Mouret continue, en tous cas, d’élaborer une œuvre originale, loin de la tentation de l’aseptisation qui gagne un grand nombre de productions françaises ou du mimétisme du modèle américain. Et, de ça, il faut lui savoir gré.
Pas complètement d’accord avec toi : http://rue2provence.com/2018/09/23/cinema-emmanuel-mouret-mademoiselle-de-joncquieres-2018/
Cécile de France a vaincu toutes tes résistances. 😉
Je te trouve sévère. C’est une adaptation très réussie de Diderot je trouve et Edouard Baer comme Cécile de France m’ont paru bien. Quelques mots sur le film chez moi.
Pas trop sévère quand même. 😉
Moi, j’aime bien quand Marcorèle tance un film. Ce n’est pas du tout le cas, ici.
On sent bien que Marcorèle hésite. Il y a manifestement tant de bonnes choses dans ce film que les réserves sont emportées ou ne font que fleurir le torrent d’éloges.
De toute évidence, le texte est délicieux. On ne boudera donc pas notre plaisir à écouter, même si le débit est décidément plus important que dans Notting hill, et qu’il peut donner le tournis à ceux qui sont trop habitués aux dialogues creux ou approximatifs …
Les costumes vont à ravir aux personnages qui s’y sentent bien, au milieu de décors qui font rêver chacun. Là aussi, on valide sans trop de risque car si Edouard Baer est sans doute un peu moderne pour le rôle, il est loin d’être bear … (Je sais. J’ai honte, mais je la fais quand-même …).
L’histoire, on la connait puisqu’on l’a déjà vue dix fois : les marivaudages au verbe haut du type des Liaisons dangereuses font partie des échos qui retentissent à jamais en notre mémoire … Qui gagne à la fin ? Est-ce si important alors que cela tient à un fil.
La morale de l’histoire ? A l’époque, personne ne se serait permis d’aller accabler le libertin de ses frasques, sauf un mari autant jaloux que fâcheux … Alors, s’il emporte le petit lot à la fin, on dira que c’est injuste et qu’heureusement les temps ont changé. S’il trépasse, on dira que ça n’est que Justice et que la fable y trouve de la modernité.
Car la difficulté principale est là : Comment retrouver notre innocence quand un marquis obsédé court les jupons à longueur de temps, comme s’il en faisait profession, et alors surtout quand la question philosophique de la liberté de la moitié de l’humanité est posée face aux assauts plus ou moins galants de l’autre moitié qui ne penserait qu’à la posséder ? Comment, soudain, trouver sympathique le libertin assidu du 18ème siècle alors qu’on ne sait plus nous-même si on est importun ou opportun lorsque l’amour, le désir ou je ne sais quelles hormones nous donnent l’énergie d’aller tenter le coup au risque de se prendre un coup d’ombrelle ou de bombe lacrymogène ?
Peut-être que MADEMOISELLE DE JONCQUIÈRES aidera à éclaircir le débat même si ce n’est pas son rôle.
Car MADEMOISELLE DE JONCQUIÈRES est d’évidence une très aimable distraction dont nous aurions bien tort de nous priver !
J’suis d’accord avec POULAIN, alors je fais court (plus court que ce foutu bavard !)
Ca a l’air très chouette, et j’irai donc le voir !
(Même si je ne suis pas fou non-plus de Bear, qui n’obère pas la qualité globale du film !)
Mais je n’y crois pas ! Ce bouffon de Gudule, qui résume le truc en une ligne et nous glisse un jeu de mot pourri sur Edouard Bear !
Avec une faute en plus : C’est Aubère, pas Obère !
Va te cacher, Gudule ! N’importe où, même derrière un réverbear ! T’as pas honte, impubear ! On va te livrer à Cerbear !