Affiche du film La vie privée de Sherlock Holmes
1888. Sherlock Holmes et le docteur Watson viennent en aide à une jeune femme amnésique sauvée in extremis des eaux sombres de la Tamise. Leur enquête va les mener sur les traces du mari de l’infortunée, mystérieusement disparu…
Les adaptations cinématographiques les plus réussies des aventures du limier de Baker Street ont souvent été celles qui se sont détachées de l’œuvre originale pour mieux se réapproprier le célèbre personnage (que ce soit en imaginant sa jeunesse, son existence après sa mort supposée aux chutes du Reichenbach ou, comme c’est le cas ici, suite à la découverte tardive d’un texte inédit du docteur Watson). La vie privée de Sherlock Holmes fait partie de cette catégorie et parvient à égaler les meilleurs récits imaginés par Arthur Conan Doyle en mettant l’accent sur les zones d’ombre et les failles du vaniteux détective qui s’humanise progressivement devant la caméra de Billy Wilder. Rien de plombant dans cette volonté d’appréhender les côtés sombres du célèbre enquêteur, le réalisateur de Certains l’aiment chaud ayant le bon goût de l’accommoder à sa fameuse sauce faite d’ironie et de répliques pince-sans-rire. Wilder en profite pour aborder de front la question de l’homosexualité de son héros dans un réjouissant préambule qui, tout en dévoilant un Watson plus coquin qu’austère, prépare habilement le spectateur à la romance platonique qui va naître entre Sherlock Holmes et sa cliente, interprétée avec finesse par Geneviève Page.
Que les fans se rassurent, tous les éléments de l’univers holmésien sont bien là. Les rues sombres de Londres noyées dans le brouillard, les calèches, le 221b Baker Street et madame Hudson, le chapeau, la loupe et le violon du détective, sans oublier l’addiction de ce dernier à la cocaïne. Même Mycroft Holmes est de la partie (auquel Christopher Lee prête son impressionnante stature) ainsi que l’un des monstres les plus célèbres de Grande Bretagne. Seul l’inspecteur Lestrade manque hélas à l’appel, retiré du montage final d’un film qui devait à l’origine durer quatre heures.
Même en l’état, La vie privée de Sherlock Holmes reste l’un des plus mémorables films sur le tandem Holmes Watson, notamment grâce à la parfaite alchimie entre leurs interprètes. Si Robert Stephens n’est sans doute pas la meilleure incarnation du détective à l’écran, la composition de Colin Blakely dans le rôle du docteur est tout à fait séduisante et échappe aux stéréotypes habituels sur le personnage.
Des faubourgs de Londres aux vastes étendues ensoleillées des Highlands, Billy Wilder prouve une nouvelle fois ses qualités de conteur et de metteur en scène (la scène des adieux à l’ombrelle est un grand moment de cinéma, plein de poésie) dans ce film d’aventure au scénario malin et délicieusement ambigu qui lorgne vers le fantastique avant de s’autoriser une étonnante fin dramatique.
Exemplaire, mon cher Watson.

Jaquette Blu-ray de La vie privée de Sherlock Holmes Sortie le 2 mai 2018 en Blu-ray et DVD, La vie privée de Sherlock Holmes retrouve une nouvelle jeunesse grâce à L’atelier d’images qui propose une version restaurée haute définition du chef d’œuvre méconnu de Billy Wilder.
Si l’image affiche parfois un léger voile, notamment dans les scènes d’intérieur, ainsi que quelques griffures, la copie est néanmoins d’une qualité sans précédent et permet d’apprécier le film à sa juste mesure.
Les nombreux bonus inédits ne sont pas en reste (saluons l’éditeur qui a tenté de reconstituer avec les éléments – scénaristiques, sonores et photographiques – à sa disposition les nombreuses scènes coupées du film). Ils sont la cerise sur le gâteau de cette belle édition qui devrait faire référence.