La bataille des Thermopyles, et la résistance désespérée du roi Léonidas et de ses 300 Spartes contre les immenses armées Perse du roi Xerxès, revisitée par Zack Snyder sous la houlette visuelle du dessinateur Frank Miller vaut son pesant de chocolat rance.
Faussement original, le film reprend le style graphique élaboré un an plus tôt par Robert Rodriguez pour adapter Sin City, une autre œuvre de l’auteur de bandes dessinées américain.
Sauf que Zack Snyder a le mauvais goût d’enfler le procédé en y rajoutant ralentis et brusques accélérations au cœur de violents combats où giclent abondamment des flots de sang virtuel.
Si le spectacle possède par moment une indéniable force picturale (la chute des Perses du haut d’une falaise), il souffre aussi d’une représentation académique de l’antiquité grecque. Bref, 300 est au cinéma ce que l’art pompier est à la peinture : une représentation idéalisée et boursouflée d’un évènement historique connu.
Une vision qui n’a vraiment rien d’original puisqu’elle reprend aussi les poncifs en vogue dans les péplums remis au goût du jour depuis Gladiator. Chant de femmes modulant des « Ooooh » et des « Aaaaah » sur des airs arabisants, décors numériques à foison et, bien sûr, l’éternel champ de blé qui est devenu au péplum moderne ce que le chien est au film catastrophe : un élément obligatoire.
Mais le plus embarrassant reste le sous-texte glauque que trimballe le film de Zack Snyder.
Les héros, menés par un roi Léonidas au torse glabre et aux tablettes de chocolat apparentes, sont représentés comme de valeureux blancs, droits dans leurs spartiates. Des Supermen à la cape rouge qui poussent des « Houha » guerriers dignes de GI et défendent leur pays contre l’envahisseur Perse (aujourd’hui l’Iran… tiens, tiens !) : ramassis de monstres dégénérés aux pratiques contre nature dirigés par un Xerxès, grande drag queen en calbute doré couverte de piercing et de chaînes, fourbe et sanguinaire.
Face à eux, les 300 Spartes prônent la fraternité et l’esprit de corps dont rien ne peut venir à bout si ce n’est la traîtrise de l’un des leurs.
Enfin, l’un des leurs… un « monstre » là aussi : un nain laid et bossu que ses parents ont sauvé de la « glorieuse » politique eugéniste prônée par Sparte qui consistait à balancer dans un ravin les bébés faibles ou mal formés.
En résumé, 300 c’est un peu les fachos repoussant la Gay Pride. Un discours puant enrobé dans un joli paquet cadeau qui flatte l’œil et les plus bas instincts du spectateur.
Je ne suis pas de ton avis du tout, mais cela ne tient qu’à moi. Je l’ai trouvé très bien, esthétiquement parfait et côté réalisation assez bien fichu. Pourtant, je l’avoue, voir des mecs bodybuildé ce n’est pas franchement top pour ce genre de film, c’est le hic du film.
J’essaye, en général, de ne pas commencer à regarder un film qui va m’insupporter. Je me renseigne et je tente les premières images, les premières tirades, et je me dépêche de filer avant d’être resté assez longtemps devant une bouse pour être imprégné de déception. Ainsi, je trouve mon plaisir ailleurs et, très vite, je ne me souviens plus le film que j’ai condamné à l’oubli.
Mais certains films jouent avec mes émotions et tentent d’échapper à ma sanction d’exclusion, par des subterfuges souvent liés à l’esthétique ou à l’intérêt historique par exemple …
C’est ce qui ‘est arrivé avec 300. Je n’ai pas coupé.
Une fois que j’ai été pris dans les filets de ces gladiateurs bodybuildés, je n’ai eu de cesse que d’avoir le courage de filer enfin, en passant par pertes et profit le temps et les efforts que j’avais mis à supporter le début… Je n’y suis pas parvenu, espérant toujours un sursaut dans le scénario et le jeu des acteurs, qui n’arrive jamais dans 300.
300 est donc selon moi un piège de qualité et un film de très mauvaise qualité.
J’ai encore en travers de l’avoir subi, comme un mauvais goût qui n’arrive pas à passer, ou une injustice d’avoir été saisi presque malgré moi par des éléments de film que je ne juge pourtant pas comme essentiels.
Mais il faut bien reconnaître que le genre péplum moderne est saturé de productions de cette engeance : beaucoup de bruit, de baston, d’idées simples, de dialogues vides, de l’esthétique à vau l’eau, et un prétexte historique sous-exploité, mais un vide abyssale pour le surplus … On va fini par se méfier définitivement des films sur l’Antiquité …
J’avoue maintenant que j’avais lu en diagonale la critique de Marcorèle, trop impatient de vous confier mon sentiment personnel.
Je réalise sans surprise que Cinéluctable a déjà dit avec un bien meilleur talent ce que j’ai ressenti. Merci Marcorèle d’avoir subi 300 comme je l’ai subi ! je me sens moins seul ainsi…
A chaque calamité, sa riposte !
J’invite donc les lecteurs de Cinéluctable à la jouer en deux temps :
1) – Vous vous imposez « 300 », et vous vous emmerdez grave jusqu’au bout du film … Mais vous tenez jusqu’au bout, conscients de la récompense que vous gagnerez à la fin, comme un bon vin chaud au bas des pistes de ski …
2) – Ensuite, vous regardez « Spartatouille », la parodie de 300 ! Et alors ! Haaa, ça fait du bien !… Vous serez vengés !
Je vous colle juste le lien de l’annonce, pour vous mettre en bouche :
Bref, c’est à croire, que 300 n’a été créé que pour légitimer son antidote : Spartatouille ! On croirait une magouille de labo pharmaceutique …
Et ne vous méprenez pas, d’ailleurs, car je tiens à vous prévenir : C’est pas très fin, Spartatouille, mais par rapport à 300, c’est l’académie française ! Et les deux films bout à bout, et bien, vous avez de quoi gamberger un bout de temps sur le cinéma !
« L’union même de la médiocrité fait la force. »
Homère
Il se la pète grave, POULAIN, à nous faire croire qu’il connait par coeur Homère !
Moi aussi je peux le faire, tiens, et dans le texte, en plus !
Ἄνδρα μοι ἔννεπε, Μοῦσα, πολύτροπον, ὃς μάλα πολλὰ
πλάγχθη, ἐπεὶ Τροΐης ἱερὸν πτολίεθρον ἔπερσε·
πολλῶν δ’ ἀνθρώπων ἴδεν ἄστεα καὶ νόον ἔγνω,
πολλὰ δ’ ὅ γ’ ἐν πόντῳ πάθεν ἄλγεα ὃν κατὰ θυμόν,
ἀρνύμενος ἥν τε ψυχὴν καὶ νόστον ἑταίρων.
On se demande qui se la pète, Gudule ! Tu parles Grec, maintenant !
Tu pourrais traduire, quand-même, pour les ceux-ce qui n’ont pas tes lettres !
Vas-y toi-même, Hé, toi, grand connaisseur de L’Odyssée !
C’est pas très glorieux, comme réponse, dis-donc !
Par pure générosité, et pour compléter tes informations, je te propose la traduction de Philippe Jaccottet :
Ô Muse, conte-moi l’aventure de l’Inventif :
celui qui pilla Troie, qui pendant des années erra,
voyant beaucoup de villes, découvrant beaucoup d’usages,
souffrant beaucoup d’angoisses dans son âme sur la mer
pour défendre sa vie et le retour de ses marins
Je croyais que tu allais nous la jouer humour et traduire en anglais !
Tell me, O Muse, of the much-traveled man, who wandered many ways after he had sacked the sacred city of Troy. He saw the cities of many men and learned their mind. Then he suffered woes in his heart on the sea, seeking to save his life and the return of his comrades.
Je propose qu’on arrête là, sinon, on va finir par se faire repérer ! On ne va pas traduire ça en 300 langues, tout de même !
Bonsoir POULAIN !
C’est vrai qu’il fatigue vite, Gudule, alors dors bien ! Et tant pis, on reparlera une autre fois de l’hexamètre dactylique dont tu nous avais pourtant proposé un célèbre exemple avec ton pote Homère !
Bonsoir GUDULE ! Bonsoir Cinéluctable ! Bonsoir aux 300 aussi ! Requiescite in pace !