John, un gamin de 8 ans sans ami, a fait le vœu que Ted, son ours en peluche, prenne vie… Et son souhait s’est réalisé. Mais, 30 ans plus tard, le joli conte de noël à toutes les chances de briser son couple, d’autant que le gentil nounours est devenu une peluche miteuse, alcoolique et libidineuse.
Voici donc la fameuse perle comique qui nous vient des États-Unis ? Sauf qu’ici le terme de perle paraît un peu trop sophistiqué pour cette bouse cinématographique.
Il faut dire que le concept du film est tout simplement « étronnant » : comment faire dire un maximum de « pipi, caca, prout, bite, chatte, fion » à un ours en peluche qui se drogue et baise à tout va ? Le tout torché avec un humour lorgnant à la fois sur les gags absurdes façon ZAZ (Zucker – Abraham – Zucker) et ceux des sitcoms façon Alf … L’humour fin en moins et à ceci près que les réalisateurs de Y-a-t-il un pilote dans l’avion ? auraient certainement eu l’intelligence de ne développer que deux ou trois gags autour de ce nounours mal dégrossi et non un film entier.
D’ailleurs, rapidement à court d’idées scatologiques, de crottes en plastique et de vocabulaire lubrique, le réalisateur cherche à ratisser large en tentant de plaire aux « adulescents » nostalgiques à coups de foireux clins d’œil télévisuels et cinématographiques allant des années 80… à nos jours : c’est qu’il faut aussi toucher le public adolescent à qui ce film régressivement anal est clairement destiné. Tout en s’imprégnant de l’humour de salle de garde, le jeune spectateur se verra discrètement initier aux douces flatulences d’un racisme latent envers tout ce qui ne ressemble pas à un bon blanc svelte et hétérosexuel (ou à son nounours crème !).
Que les parents se rassurent, comme souvent pour ce genre de film, Ted a tendance à se déballonner sur la fin, offrant son lot de bons sentiments simplistes accompagné de la petite musique triste au piano qui va bien.
Dernier conseil : pour peaufiner ce visionnage merdique, une fois n’est pas coutume, choisissez la version française.
Après que Philippe Manœuvre ait massacré la voix de Paul, le gentil extraterrestre de Greg Mottola, c’est au tour de Joey Starr de pourrir la voix de Ted.
C’est bien simple, grâce à lui, le nounours ne parle pas mais dégueule et débite son texte avec la raideur d’un constipé chronique en attente de son prochain lavement.
Si avec tout ça vous n’avez pas compris que Ted est à chier…
Et oui, Ted est « à chier », et on s’en doutait après avoir déjà subi la bande annonce au ciné.
Ne pourrait-on pas proposer aux salles de ciné de sélectionner les bandes annonces en fonction du film choisi par leur client, et d’éviter de servir de telles niaiseries grossières à ceux qui, contre le torrent décérébrant, vont encore au ciné pour se faire plaisir et s’élever un peu ?
Force est de constater que le genre merdique se développe à vitesse grand V, et qu’il va falloir d’urgence développer notre vocabulaire pour évoquer les différentes catégories de bouse qu’on nous sert. Peut-être serait-il judicieux de demander à l’Académie Française ou à une maternelle de quartier de travailler à la création d’un véritable lexique du cinéma merdique, pour continuer à évoquer avec précision et sans nous répéter ce style cinématographique nouveau et détestable …
L’autre solution est de tourner le dos à ce genre, mais on risque d’être vite dépassés ou submergés si on ne suit pas l’évolution du phénomène. Si je refuse tout net de supporter de visionner moi-même ce genre de film réuni dans mon esprit dans la catégorie « Effroyable » parfois proposée par Marcorèle ; je suis néanmoins intéressé par des critères plus ciselés permettant de cerner ces horreurs dans leur caractères particuliers. On classe les bonnes choses et l’on sait en parler avec raffinement. Pourquoi ne pas s’astreindre à disserter avec la même qualité de langage et d’analyse des choses à éviter. Car pouvoir mieux parler du ciné-merdique permettra forcément de mieux le comprendre.
Au delà du plaisir légitime de brocarder, il est en effet urgent de connaître cet ennemi qui avance contre nous, pour envisager de gagner la bataille contre lui. Il nous faut étudier cet ennemi cinématographique qui s’installe dans nos salles : adopter les méthodes et les stratégies adaptées pour pouvoir d’abord l’empêcher de s’insinuer plus avant dans notre environnement cinématographique, et envisager de l’anéantir un jour.
Chacun connaît ce précepte du général chinois Sun Tzu, qui nous enseigne à travers le temps, dans « l’Art de la guerre » : «Qui connaît son ennemi comme il se connaît, en cent combats ne sera point défait. Qui se connaît mais ne connaît pas l’ennemi sera victorieux une fois sur deux. Que dire de ceux qui ne se connaissent pas plus que leurs ennemis ?».
Sun Tzu n’allait pas au cinéma, mais il aurait certainement commencé par aller à la rencontre de cet ennemi insidieux de notre esprit et de celui de nos enfants, pour être à même de le combattre ensuite. Marcorèle va voir « Ted » et bien d’autres films merdiques ; il va au contact de l’ennemi du cinéma que nous aimons ; pour comprendre comment il vit, connaître ses ressorts, ses moyens et ses intentions. La civilisation et les cinéphiles remercient Marcorèle de son abnégation et lui souhaitent bon courage dans sa lutte aux avant-poste.
Excellemment dit Poulain !