Dire que le nouveau film des frères Cohen surpasse Cent dollars pour un shérif d’Henry Hathaway, dont il est le remake, ne fait aucun doute.
Encore une fois, les deux frères se sont appropriés un nouveau genre et ont transformé un western poussif en une aventure initiatique. Une jeune fille, voulant rendre justice à son père assassiné, se découvre – dans sa quête de vengeance – deux pères de substitution en la personne du marshal Rooster Cogburn et du Texas Ranger LaBoeuf qui l’accompagnent.
La mise en scène, respectueuse d’un genre quasiment disparu, fait la part belle aux grands espaces et s’illustre par un classicisme bien éloigné des œuvres les plus débridées du tandem.
Les acteurs, la jeune Hailee Steinfeld en tête, jouent leur partition à la perfection avec la pointe d’humour qui fait toute la saveur des films des Cohen.
Jeff Bridges, à des années lumières de son rôle fadasse de messie New Age de l’informatique dans Tron l’héritage, en fait des tonnes en shérif borgne, bougon et bagarreur mais il le fait bien.
Quant à Matt Damon, en Texas Ranger intègre et droit dans ses bottes, il confirme son grand talent et prouve qu’il possède également un réel sens de l’autodérision.
Alors pourquoi True Grit n’est-il pas aussi enthousiasmant que l’Open Range de Kevin Costner ou que le récent 3H10 pour Yuma de James Mangold ?
Peut-être parce que le récit, une fois la problématique posée, manque singulièrement d’enjeu et d’intensité dramatique. Les bandits sont quasiment absents du voyage et, lorsqu’ils apparaissent enfin, sont plus pathétiques et stupides que réellement dangereux. Pour le coup, la prestation de Josh Brolin en devient anecdotique et sans grand intérêt.
Et que penser du règlement de compte, rapidement évacué ? Que le western n’était qu’un prétexte pour les deux réalisateurs, plus intéressés par les rapports humains que par l’action et les fusillades ?
Pourquoi pas ?
Mais alors, le film manque singulièrement d’émotion et la conclusion, avec cette vieille fille revêche, n’aide vraiment pas à emporter l’adhésion du spectateur ?
Le roman de Charles Portis méritait-il une (seconde) adaptation ? Sans doute pas !
Henry Hathaway l’avait-il déjà compris en préférant, à l’époque, filmer platement un récit convenu pour mieux mettre en valeur un acteur mythique sur le déclin ? Un John Wayne fatigué et usé que Jeff Bridges, malgré tout son talent, a bien du mal à faire oublier.
Il faut bien se rendre à l’évidence, malgré d’indéniables qualités, l’incursion des frères Cohen au Far West se résume, cette fois, à un coup (de feu) pour rien !