
Alors qu’il vient fêter les 60 ans de sa sœur, un ancien combattant de la guerre d’Algérie s’en prend violemment à un invité maghrébin. Cette agression raciste fait ressurgir les traumatismes et les non-dits de son passé de jeune soldat plongé dans une sale guerre.
Avec Des hommes, Lucas Belvaux aborde le sujet toujours sensible, et peu abordé par le cinéma français, de la guerre d’Algérie et se lance le difficile pari de traiter de front les faits ainsi que leurs conséquences bien des années plus tard. Un grand écart nécessaire pour tenter de mettre en lumière tous les tenants et les aboutissants de ce conflit mais qui se heurte à un scénario confus qui peine, dans une première partie, à jouer sur deux époques. Difficile, en effet, de savoir qui est qui au milieu des incessants allers-retours entre passé et présent, d’autant que les comédiens censés représenter Depardieu et Darroussin jeunes sont assez semblables physiquement. Difficile, aussi, de rendre compte des traumatismes silencieux de ces anciens combattants qui ont passé leur vie à se taire. Pour ce faire, le cinéaste opte pour des monologues intérieurs qui, s’ils ont le mérite d’éclairer les états d’âme des personnages, surlignent et alourdissent le propos.
Heureusement, la seconde partie centrée sur la vie des appelés en Algérie arrive à point nommé pour éclairer les comportements obscurs, voire ambivalents, de ses protagonistes après leur retour en France. Belvaux renoue alors avec son style incisif et donne à voir, à travers les souvenirs de deux hommes qu’il recompose par bribes, le passé déboussolé de tous ces soldats oubliés, dont le quotidien fut partagé entre torpeur et horreur.
Porté par trois solides comédiens (Depardieu, Darroussin et Frot), ce film salutaire qui questionne la résilience de chacun face à des évènements traumatiques parvient, in fine, à lever le voile sur les blessures secrètes causées par cette guerre, tout en prenant soin de ne pas juger ou de prendre parti. Un témoignage aussi sensible qu’effrayant de ce qu’était la vie de ses jeunes appelés, partagés entre devoir pour la nation et incompréhension de leur mission : Des hommes, tout simplement.
Lucas Belvaux de toute façon c’est toujours à voir.
Cinéaste découvert grâce à toi.🙂
Oui, il a une place à part. L’un des seuls, en France, a avoir un cinéma engagé. 🙂
Là nous convergeons 😀
Le regard d’un Belge sur un point d’histoire de France encore fort sensible peut être intéressant en effet. Reste la forme qui semble ne pas être totalement convaincante.
Oui, c’est dommage pour la forme, mais le film vaut le détour malgré tout.
De toute évidence, un film à voir, pour la mémoire et pour le cinéma. Un peu de courage sera nécessaire pour aller le voir mais nous devons bien cela à la vérité et à l’histoire, ainsi qu’à tous ceux qui participent à ce rappel plutôt que de verser dans la facilité.
Sans chercher à déconsidérer qui que ce soit, nous devons voir, même si c’est du cinéma, ce qui s’est passé, pour tenter de ne pas mentir sur notre histoire et ne pas oublier qu’il ne faut jamais donner les clef du pays aux haineux ni aux oublieux qui n’honorent pas la nation.
En effet, DES HOMMES commandent à DES HOMMES qui obéissent et font subir à DES HOMMES ce que bien DES HOMMES ne peuvent imaginer et que DES HOMMES voudraient oublier. DES HOMMES font la guerre pour des raisons inavouées tandis que DES HOMMES n’ont qu’une idée : retrouver la liberté de diriger leur destin sans que DES HOMMES venus d’outre mer viennent leur montrer comment il faut vivre.
DES HOMMES différents vivent ensuite avec le poids du souvenir que DES HOMMES sans âme nient de manière éhontée et que DES HOMMES plus jeunes ne connaissent pas, pressés d’ajuster leurs œillères et de casser les rétroviseurs qui ne leur renvoient pas des images conformes à de leurs lubies, pour être prêts à recommencer la sale histoire en enrôlant DES HOMMES qu’ils casseront sur l’hôtel de leurs rêves de gloire.
Bien-sûr, ce sont ces hommes qui devraient aller voir DES HOMMES, mais nous les entendons déjà beugler contre DES HOMMES, un film qui les dérange, comme toute vérité. Sauf erreur, ils iront plutôt dans la salle d’à côté voir un fier à bras écervelé, brandir une mitrailleuse pour dessouder par dizaines comme au casse pipe, les ennemis qu’on leur aura désignés.
Alors, ceux qui iront voir DES HOMMES tenteront, par quelque allusion subtile et mesurée, d’élever un peu la conscience de ces va-t-en guerre, pour retarder autant que faire ce peut le moment funeste où la guerre reviendra. Courage !
Merci pour la découverte 🙂