Kennedy et moi
Simon Polaris traverse une grave crise existentielle.
Sa femme, ses enfants, ses amis, son métier d’écrivain et ses relations : tout l’exaspère et le pousse à envisager le pire. Jusqu’au jour où une montre, enfouie dans la poche de pantalon de son psychanalyste, vient lui redonner goût à la vie.
Pour son premier film, Sam Karmann offre à Jean-Pierre Bacri l’un de ses plus beaux rôles.
Ce portrait en demi-teinte d’un homme à un tournant de sa vie semble avoir été écrit pour lui.
Les commentaires de Simon – sur lui-même et les autres – font mouche et nous égayent par leur humour noir et leur lucidité. Rien n’échappe à son sens de la dérision : des spécialistes dentaires qui mettent des gants pour exercer leur métier : « comme les voleurs pour pas laisser d’empreintes », à sa famille : « Je rêvais d’un fils unique et j’ai eu deux imbéciles ! ». Simon nous émeut, nous fait rire et parfois nous venge en disant tout haut ce que certains pensent tout bas.
Dans cet état des lieux ravageur, seule son épouse trouve grâce à ses yeux. En femme dépassée et amusée par son misanthrope de mari, Nicole Garcia offre une belle composition toute en nuance, parfait contrepoint au jeu bougon et râleur de Jean-Pierre Bacri.
Et que dire des seconds rôles dans lequel le film puise aussi sa force.
Sam Karmann, Patrick Chesnais, François Chattot, Jean-Claude Brialy (hilarant de suffisance) et la trop rare Francine Bergé (mémorable servante dans Benjamin ou les mémoires d’un puceau de Michel Deville) : tous contribuent à la finesse de cette étude de caractère que viennent mettre en valeur la magnifique partition musicale de Pierre Adenot et des répliques à l’humour désenchanté : « Aujourd’hui (…) on enterre les gens avec leur montre à quartz au poignet. Enterrée ou pas, la montre continue de donner l’heure pendant un an. C’est à ça que je pense en ce moment. A tous ces types enterrés, qui ont l’heure exacte au poignet !».
Pour un coup d’essai, Kennedy et moi est quasiment un coup de maître.