Depuis sa découverte tardive en France avec le polar The Mission, chaque nouveau film de Johnnie To est attendu comme un petit évènement par un cercle de fans toujours plus nombreux. Avec les années, cet esthète a prouvé qu’il savait manier les codes du film d’action avec une efficacité redoutable – rappelez-vous la fusillade filmée en plan séquence servant d’ouverture à Breaking news – jusqu’à atteindre une sorte d’épure dont la quête nocturne de P.T.U. est un des aboutissements.
Vengeance comporte donc tout ce qui fait le charme des réalisations du cinéaste Hongkongais.
Des gunfights virtuoses et très chorégraphiés.
L’un, poétique et abstrait, dans un sous-bois au clair de lune.
L’autre, âpre et brutal, dans une décharge où d’énormes ballots de papiers servent de boucliers mobiles aux tueurs.
On retrouve aussi la fascination du réalisateur pour les cages d’escalier et son attrait pour la cuisine et les bons petits plats que se mitonnent des tueurs plutôt portés sur la viande saignante.
Alors d’où vient la sensation que la sauce ne prend pas et que ce nouvel opus à moins de saveur qu’à l’accoutumée ?
La réponse se trouve sans doute dans la prestation indigeste de « l’idole des moins jeunes » dont le jeu – bien dissimulé derrière de grosses lunettes de soleil Optic 2000 – oscille entre absence et inexpressivité. Carence que le réalisateur tente de dissimuler derrière les pertes de mémoire de son héros vengeur et par un hommage un peu trop appuyé à quelques classiques du cinéma policier que la prestation ridicule du chanteur ne parvient à faire oublier.
D’abord parodie de Delon dans Le Samouraï, Hallyday (qui porte le nom et les accessoires du tueur melvillien) se retrouve affublé dans la seconde moitié du film du costard-cravate des tueurs de Reservoir Dogs.
Au final, Vengeance pourrait se résumer à une mauvaise blague :
Johnnie et Johnny sont dans le même bateau. Jo-Jo saborde le rafiot mais To-To parvient contre vents et marées à le maintenir à flot.
Ce qui, dans de telles circonstances, n’est pas un mince exploit !