Affiche du film Touchez pas au grisbi

Max et Riton, deux truands sur le retour, ont décidé de se ranger des voitures après être montés sur un dernier gros coup qu’ils ont tenu secret au reste du milieu. Mais c’est sans compter sur Josy, la poule de Riton, greluche volage qui n’a pas les cages à miel dans son sac à main. Séduite par Angelo, un caïd sans scrupule, l’écervelée va lâcher le morceau.
Face au voyou balèze et à sa bande de tueurs qui veulent le travailler à la caresse pour récupérer la joncaille, Max, qui n’apprécie pas qu’on lui fasse du suif, va devoir sortir l’artillerie lourde et distribuer les dragées.

Vous cassez pas le choux, en 1954, Touchez pas au grisbi dépoussière le polar à la française et lance la mode du film noir qui sera ensuite reprise par des cinéastes comme Gilles Grangier, Henri Verneuil ou Georges Lautner. En décrivant de manière réaliste les mœurs des truands d’après guerre, Jacques Becker réalise un film qui, s’il n’est pas destiné aux caves ou aux michetons, rencontrera un vrai succès populaire.
Adapté du premier roman d’une trilogie policière écrite pas Albert Simonin (les deux autres livres seront également transposés au cinéma mais sous forme de comédie : Le cave se rebiffe et Grisbi or not Grisbi plus connu sous le titre des Tontons flingueurs), Touchez pas au grisbi fait la part belle aux mœurs violentes du milieu, à son sens de l’honneur et de l’amitié ainsi qu’à son langage fleuri dont le romancier s’était fait une spécialité.
Tout en relançant la carrière déclinante de Jean Gabin, Jean Becker allait révéler une future grande gueule du cinéma français : Lino Ventura, dont c’était ici le premier rôle. Sans oublier la jeune Jeanne Moreau qui imposait déjà sa gouaille à l’écran et René Dary que la télévision allait rendre célèbre, quelques années plus tard, dans le rôle du commissaire Ménardier dans le feuilleton Belphégor ou le Fantôme du Louvres.
Loin d’être une comédie, Touchez pas au grisbi n’est pas dénué d’humour grâce à ses dialogues en argot et à quelques scènes étonnantes : comme cette fameuse explication entre Max et Riton autour d’une terrine de pâté dégustée avec des biscottes et un verre de gros-plant (cadeau de Lulu la Nantaise ?).
Scénarisé par Simonin lui-même, le film de Jacques Becker se rapproche de l’univers du romancier où, sous le langage haut en couleur, se cachent une vraie noirceur et un désenchantement certain.
Désillusion incarnée avec nuances (si, si !) par un Jean Gabin vieillissant et fataliste qui ne parvient pas à s’extraire de sa condition. Un monde où seule l’amitié virile compte, les femmes étant reléguées, aux mieux, aux rôles d’épouses ou de poules de luxe et, au pire, à ceux de femmes légères dont on doit se méfier.

Photo de Max sortant de l'appartement de Betty

Une atmosphère sombre rehaussée par la sublime photographie noir et blanc de Pierre Montazel et magnifiée par « l’air » de Max, célèbre blues à l’harmonica composé par Jean Wiener.
T’en bâilles, hein ?
Plus daté et classique que Le cave se rebiffe ou Les Tontons flingueurs, Touchez pas au grisbi ne manque pourtant pas de charme. Carte postale nostalgique d’une époque et d’un milieu aujourd’hui révolu.